Pour la plupart des habitants de Trinité-et-Tobago, la littératie physique demeure un concept étranger.  Ce n’est que ces dernières années qu’elle a fait l’objet d’une discussion au plan national, principalement grâce à l’Association des comités nationaux olympiques des Caraïbes (CANOC) et à la National Gas Company. Maintenant, tout le pays est sur le point de savoir de quoi il s’agit, car le ministère de l’Éducation s’est donné le noble objectif d’intégrer des responsables de la littératie physique dans les 403 écoles de cette nation bi-insulaire.

L’une des premières étapes de ce processus s’est amorcée en décembre, quand deux formateurs de Le sport c’est pour la vie, Kabir Hosein et Tracy Lockwood, se sont envolés vers ce pays des Caraïbes pour donner trois jours de formation à des éducateurs et entraîneurs qui maîtrisaient déjà l’enseignement de l’activité physique. Leur rôle était de former ces personnes pour qu’elles deviennent des responsables de la littératie physique, en leur donnant les compétences et les ressources nécessaires pour former les autres, ainsi qu’un accès à la plateforme de soutien aux programmes d’activité physique PLAYBuilder.

« Étant donné que c’est mon pays d’origine, je ne devrais pas être surpris, mais c’était réconfortant de voir à quel point les concepts trouvaient écho auprès de chaque enseignant et entraîneur dans son propre champ d’activités, avec ses propres défis uniques », raconte Kabir.

« Tout le monde dans la salle était très bien formé; ils étaient déjà des entraîneurs expérimentés. Mais ils ont vraiment été époustouflés de voir ces exemples simples et pratiques qui rassemblent le tout sous le concept de la littératie physique. »

En tant que responsable de PLAY Education et par le biais de Le sport c’est pour la vie, Tracy a animé des milliers de formations et d’ateliers à titre de consultante en éducation et spécialiste de la littératie physique. Ce qui a été particulièrement marquant pour elle, c’est toute l’énergie et la positivité émanant des Trinidadiens tout au long de cette formation de trois jours, d’autant plus qu’elle n’était jamais allée dans ce pays auparavant.

« Il y a de ces groupes qui insufflent de l’énergie au bon moment et au bon endroit. C’était l’un de ces groupes », se rappelle-t-elle, en soulignant que des représentants du ministère de l’Éducation de Trinité-et-Tobago étaient également présents pour voir les participants apprendre, travailler et jouer.

« C’était formidable de réunir des personnes partageant les mêmes idées et motivées à apprendre pour ensuite partager avec les autres une fois la formation terminée. J’ai trouvé très enrichissant et gratifiant de voir comment tout le monde interagissait les uns avec les autres lors des conversations ouvertes, des travaux de groupe en classe et des activités extérieures. J’ai dû à quelques occasions leur rappeler que ce n’était qu’un jeu, ce qui était hilarant mais pas surprenant, car leur nature compétitive prenait parfois le dessus. »

Des conversations surprenantes

La National Gas Company de Trinité-et-Tobago participait déjà à des programmes de financement du système éducatif national avant de commencer à s’intéresser à la lutte contre les comportements sédentaires. L’entreprise s’est mise à la recherche de sous-traitants pour aider à résoudre ce problème particulier au sein du système scolaire, et c’est là que Le sport pour la vie est entré en jeu.

« C’est probablement la première fois que c’est un bailleur de fonds qui pousse au changement. Habituellement, ce sont les secteurs du loisir, de l’éducation ou du sport qui font face au défi d’essayer de trouver du financement, mais dans ce cas particulier, le bailleur de fonds en a fait sa cause, et son défi était que le projet aboutisse », explique Kabir. 

En discutant avec les participants, Tracy a appris que Trinité-et-Tobago était confronté à un certain nombre de défis uniques pour maintenir sa population active et en bonne santé. En raison des grandes quantités de précipitations qui s’abattent sur le pays pendant la moitié de l’année, les enfants ne peuvent pas sortir et les gymnases sont extrêmement rares. 

« Nous avons également appris que les enseignants n’ont pas une bonne compréhension de la littératie physique et que bien souvent, ils ne reconnaissent pas la valeur de l’éducation physique, d’où l’importance d’introduire ces responsables de la littératie physique », affirme-t-elle.

« Certaines conversations avec les participants m’ont étonnée. Par exemple, j’ai appris que l’infrastructure des programmes d’activité physique et d’éducation physique était minime. Bien souvent, les écoles ne disposent pas d’espaces comme des gymnases et de grands terrains où les élèves peuvent bénéficier d’un programme cohérent et de qualité. Les familles passent beaucoup de temps dans leur véhicule coincés dans des bouchons de circulation, ce qui ajoute aux comportements sédentaires qui existent déjà. » 

Pour aider les participants à organiser des activités dans de petits espaces, comme c’est probablement ce dont ils disposeront dans les écoles, la formation s’est concentrée sur les activités pouvant être réalisées dans des salles de classe et de petits espaces extérieurs.

« Nous avons également échangé des idées sur la façon de faire bouger les élèves et de développer la littératie physique dans différents contextes. On peut par exemple créer des parcours sensoriels dans les couloirs de l’école, et de nombreuses activités peuvent se dérouler en classe. Certaines des activités présentées pendant la formation peuvent être associées à d’autres matières scolaires, ce qui donne vie à l’apprentissage! »

Elle a aussi discuté avec eux de la façon de tirer le meilleur parti des pauses.

« La récréation est un autre contexte qui a été abordé, et des ressources ont été partagées. Connaissant l’infrastructure des établissements scolaires à Trinité-et-Tobago, je pense vraiment que l’on devrait consacrer plus de temps à trouver des moyens de faire bouger les enfants dans de petits espaces. »

Le troisième pilier de l’éducation

Alors que la littératie physique prend de l’ampleur à Trinité-et-Tobago, l’une des figures encourageant ce changement de culture est le président de la CANOC, Keith Joseph, qui a récemment déclaré : « Nos dirigeants semblent incapables d’aller au-delà de la numératie et de la littératie en tant que piliers fondamentaux de l’éducation. La vérité est que sans la littératie physique, nous sommes incapables de devenir une personne à part entière. »

Il a également qualifié la littératie physique de « troisième pilier de l’éducation ».

Pour Kabir, qui a déjà travaillé au sein de la CANOC avant d’émigrer au Canada avec sa famille, il a été émouvant de voir son pays d’origine reconnaître l’importance de la littératie physique et commencer à l’introduire dans son système scolaire. 

Si tout se passe comme prévu, la littératie physique deviendra une partie intégrante du programme d’enseignement primaire à Trinité-et-Tobago, ce qui aura pour effet de faire bouger davantage un plus grand nombre d’élèves. Le sport c’est pour la vie et ses partenaires devront donc continuer à former les centaines d’enseignants qui seront nécessaires pour réussir cet exploit.

« Nous aimerions continuer notre implication auprès des responsables de la littératie physique dans les écoles primaires », dit Kabir.

« Trinité-et-Tobago a célébré ses 60 ans d’indépendance l’année dernière. À mesure que le pays évolue, la littératie physique peut agir de catalyseur pour stimuler le changement de comportement afin que chacun puisse s’épanouir au sein de la nation. » 

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