Célébrons le Mois de l’histoire autochtone

Les communautés autochtones se réunissaient pour bouger, compétitionner et profiter des bienfaits de l’activité physique bien avant que le Canada ne devienne un pays. Au cours du Mois de l’histoire autochtone cette année, innombrables sont les raisons de célébrer les traditions transmises de génération en génération et la résilience des peuples autochtones.

Pour l’athlète autochtone Len Morris Jr. du club de canoë de Geronimo, les raisons de célébrer sont nombreuses. Il a participé à des courses de canoë de guerre partout dans le monde et a récemment représenté le Canada au niveau international en course de pirogue à balancier à Tahiti et en Australie. Originaire de la Première Nation de Tsartlip, il est issu d’une longue lignée ininterrompue de pagayeurs autochtones.

« Nous sommes tissés serrés. Mes grands-parents Ivan et Madeline ont fondé le club de canoë en 1974, et tout était familial. Mon père, mes oncles et mes tantes ne pagaient plus beaucoup aujourd’hui, mais ils étaient tous impliqués et m’ont transmis leur savoir, ainsi qu’à mes frères et cousins, et maintenant nos enfants s’y intéressent », a raconté Len Morris Jr. à Le sport c’est pour la vie.

« Quand mes grands-parents dirigeaient le club, ils le finançaient de leur propre poche. Nous avons participé à des courses partout dans le sud de l’île de Vancouver, jusqu’à Chilliwack et l’État de Washington. Ils payaient le traversier, le transport, l’essence. Ma grand-mère cuisinait et nourrissait la famille avant, pendant et après la course, donc nous étions vraiment choyés. »

Maintenant que ses grands-parents sont décédés, c’est à Len Morris Jr., ainsi qu’à ses frères et cousins, que revient la responsabilité de former la prochaine génération de pagayeurs.

« Nous avons beaucoup de jeunes enfants qui participent, et c’est important qu’ils le fassent.  Quand j’étais jeune, j’y étais à trois, quatre ou cinq ans pour apprendre à pagayer. C’est génial de les voir apprendre comme je l’ai fait, les enfants de mon cousin et tous les autres, et garder les traditions vivantes. Mes cousins, mes frères et moi-même avons le devoir de former la prochaine génération. Nous les laissons s’amuser au début, puis quand ils grandissent, nous leur enseignons le respect du canoë et la bonne façon de s’entraîner. Nous transmettons ce que nous avons appris. »

Len Morris Jr. apprécie également l’aspect compétitif du sport et est fier des réalisations de son équipe au cours des dernières années.

« C’est plutôt sympathique d’aller aux courses et d’avoir la possibilité de se visiter. Mais même si vous êtes de bons amis sur la plage, quand la course commence, l’amitié est mise de côté. Les courses de canoës de guerre sont assez intenses, surtout avec les grandes embarcations. C’est une question de fierté », a-t-il affirmé.

« Nous sommes également passés aux pirogues à balancier de style polynésien, et nous avons fait plutôt bonne figure au cours des 10 dernières années. Nous avons remporté les championnats canadiens à cinq reprises et avons eu la chance de représenter le Canada à deux reprises. La première fois, c’était aux championnats du monde à Tahiti, puis nous sommes allés en Australie en 2019. Mon fils a pu y participer également, dans la catégorie U-19 pour le canoë en solo. J’ai moi-même participé en solo, ainsi qu’en équipe de six », a-t-il mentionné.

« C’était assurément un grand changement. Une expérience vraiment révélatrice. Nous avons beaucoup de succès dans notre circuit de canoë de guerre, mais le niveau international, c’est une tout autre paire de manches, un tout autre niveau. »

Célébrons les réalisations autochtones

Cette année, le Mois de l’histoire autochtone arrive à un moment décisif pour le Canada, alors que la découverte des restes de 215 enfants sur le site d’un pensionnat de Kamloops a suscité l’indignation nationale et fait les manchettes dans le monde entier. Pour Mataya Jim, issue de la Première Nation W̱SÁNEĆ de W,SIKEM et apparentée aux Penálaxeth’ et Wwaayaa, c’est une période d’émotions contradictoires. En tant que coordonnatrice des projets autochtones à Le sport c’est pour la vie, elle veut veiller à ce que la résilience autochtone soit représentée autrement que dans la tragédie et qu’elle s’illustre par le biais des réalisations autochtones et des succès d’athlètes issus de ces communautés, comme Len Morris Jr.

Len Morris Jr.

« Comme organisation, nous ne voulons pas nous concentrer uniquement sur la victimisation des peuples autochtones, mais plutôt célébrer les succès des peuples autochtones malgré ces défis, ces chagrins et ces expériences que nous avons vécues », a-t-elle expliqué.

« Cela ne veut pas dire qu’en tant qu’organisation, nous ignorons ces événements. Nous avons certainement besoin de mesures concrètes et d’une sensibilisation à la véritable histoire du Canada et à sa relation avec les peuples autochtones. Mais nous devons également reconnaître et célébrer toute la beauté des communautés et du sport autochtones lorsque nous nous réunissons et compétitionnons. C’est cela qui mérite d’être souligné. »

Elle se dit émerveillée par la résilience des peuples autochtones.

« Il y a eu des tragédies dans nos familles et dans notre passé, mais nous devons célébrer notre résilience et notre force. Idéalement, un jour, nous arriverons au point où nous aurons toujours cette résilience et cette force, mais nous n’aurons plus besoin de les utiliser. Ce serait bien de vivre dans un Canada ou dans un monde où il n’est pas nécessaire de les utiliser tout le temps. »

Comme Len Morris Jr., Mataya Jim a grandi au cœur de traditions sportives intergénérationnelles, y compris les courses de canoë et le soccer. Cet esprit de communauté et cette approche de la compétition l’ont profondément marquée lorsqu’elle était enfant.

« Lors de ces événements, nous nous réunissions dans une atmosphère très communautaire et familiale, c’était super accueillant. Ce n’était pas juste familial en apparence, puisque c’était vraiment la famille. Tout est basé sur la famille élargie dans les communautés autochtones. Tout le monde était là pour prendre soin les uns des autres, pour célébrer et passer du temps ensemble. Pendant les compétitions, nous voyagions et voyions des membres de la famille que nous n’avions pas vus depuis longtemps et participions à la compétition ensemble. Il est difficile d’exprimer les sentiments et la structure là-bas », a-t-elle partagé.

« Les peuples autochtones voyagent pour se rassembler depuis la nuit des temps. Nous nous réunissons, que ce soit pour une cérémonie ou pour des événements comme des pow-wow pour danser et célébrer. L’idée de se réunir et d’être actif fait partie intégrante de nombreuses cultures autochtones. Il se trouve que cela fonctionne aussi pour le sport. »

C’est ce qui explique pourquoi Mataya Jim ne croit pas que les Autochtones devraient subir de pressions pour intégrer les systèmes traditionnels de sport et d’activité physique.

« Souvent dans le sport au Canada, on dit que les peuples autochtones doivent s’adapter pour être plus en phase avec les structures occidentales actuelles. Je pense plutôt que c’est le moment idéal de reconnaître que les peuples autochtones disposent de grandes structures pouvant être appliquées à la société canadienne dans son ensemble. Nos enseignements sont riches et nos manières de vivre sont inspirantes.  Il est temps de reconnaître que certains d’entre nous travaillent fort pour se les réapproprier compte tenu de notre historique de colonisation », a-t-elle déclaré.

« L’équilibre est complexe entre reconnaître notre vécu difficile avec le Canada et reconnaître que nous avons conservé beaucoup de choses. Nous avons pu tirer parti de notre propre histoire. Notre histoire et nos célébrations nous ont permis de traverser les épreuves. »

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