Quatre questions avec Mike Shaw
Par Will Johnson
Mike Shaw était entraîneur de ski acrobatique dans le monde entier, le point culminant d’une histoire d’amour de toute une vie avec ce sport, lorsqu’une blessure inattendue l’a presque rendu quadraplégique en 2013. Alors qu’il commençait à guérir, en surmontant les obstacles liés à sa santé mentale et en s’engageant à être reconnaissant chaque jour, il s’est retrouvé sur une nouvelle piste en tant que conférencier et auteur inspirant. Le sport c’est pour la vie s’est entretenu avec lui pour entendre les leçons qu’il a apprises au cours de son cheminement.
#1. Votre prochain ouvrage Never Part of the Plan donne aux lecteurs un aperçu authentique de votre état d’esprit avant, pendant et après un accident dévastateur qui a failli vous paralyser du cou aux orteils. C’était le genre d’expérience que vous n’auriez jamais pu prévoir, mais à laquelle vous deviez simplement survivre. Comment avez-vous trouvé la force mentale nécessaire pour traverser cette expérience et qu’avez-vous fait pour le reste de votre vie maintenant que vous êtes à nouveau complètement mobile?
Never Part of the Plan traîte du plus grand défi auquel j’ai été confronté.
Après mon accident et ma blessure à la moelle épinière, j’ai dû développer un niveau de force mentale qui provenait directement de mes expériences de ski acrobatique. On ne peut pas progresser dans le sport sans aller jusqu’à un point de rupture, se faire renverser et se relever pour réessayer. Le ski acrobatique est peut-être l’un des meilleurs sports en fait de développement de sa résilience. Je pense que les planchistes à roulettes vivent aussi la même chose, mais d’une façon ou de l’autre, on ne peut pas s’améliorer sans faire preuve d’excellente force mentale et montrer notre capacité à se relever après une grosse chute.
En fin de compte, la gratitude a joué un rôle important en m’aidant à gérer les revers. J’étais en mauvaise forme, mais j’étais reconnaissant que tout – et je dis bien tout – dans mon corps revienne comme avant. Quand j’ai eu assez de force dans les bras pour enfin me brosser les dents une première fois, j’étais si heureux que j’en ai pleuré. Quand j’ai commencé à être en mesure de me transférer de mon fauteuil roulant à mon lit par moi-même et quand j’ai commencé à me tenir debout, la gratitude a été le carburant de ma guérison. J’ai trouvé la force et un changement de perspective qui m’ont permis de continuer – tout cela grâce à un profond sentiment de reconnaissance.
J’ai ensuite eu envie de reprendre les skis. J’ai gardé cet objectif à l’esprit, mais j’ai aussi vu beaucoup de gens à l’hôpital qui auraient tué pour avoir la possibilité de marcher à nouveau – comme moi. J’ai donc dû travailler dur. Si ce n’était pas pour moi, je le ferais pour toutes les personnes atteintes de lésions de la moelle épinière qui donneraient tout pour retrouver l’usage de leur corps. Je suis passé en mode gratitude, j’ai appris à échouer en progressant, je me suis orienté sur la croissance et, comme tous les athlètes, j’ai compté sur mon équipe et ma communauté pour me faire passer au niveau supérieur.
Bien que je ne sois pas guéri à 100 % – je ne sens toujours pas la peau de mes jambes et il y a beaucoup d’autres stigmas liés à ma blessure avec lesquels je dois composer – je suis reconnaissant chaque jour de ma deuxième chance.
#2. Lors du sommet canadien « Le sport c’est pour la vie » de 2020, vous avez fait une présentation aux délégués sur la prévention des blessures liées à la performance. Il est évident que nous ne pouvons pas prévenir toutes les blessures, mais nous pouvons travailler à une culture sportive qui soit aussi consciente de la sécurité que possible. Quels étaient les principaux éléments que vous avez essayé de présenter aux participants pendant votre exposé?
Personne n’aime la sécurité – oui, même les entraîneurs n’aiment pas la sécurité.
Si vous êtes un entraîneur qui a déjà envoyé un athlète sur le terrain, le champ, la glace ou la montagne avec une cheville, un poignet ou un genou amoché, qu’est-ce qui est le plus important : la performance ou la sécurité ? La plupart diront la sécurité, mais nos actions – comme faire jouer les athlètes quand ils ne sont pas à 100 % – parlent plus fort que les mots. Je ne dis pas que personne n’aime la sécurité, mais ce n’est tout simplement pas sexy.
La sécurité et la prévention des blessures devraient toujours être une priorité absolue, mais au lieu d’essayer de forcer un changement de comportement en insistant à outrance sur la sécurité auprès des entraîneurs, des joueurs et des équipes, nous pouvons nous concentrer sur ce que tout le monde veut : de meilleures performances. En nous attardant simplement à quatre attitudes négatives : la précipitation, la frustration, la fatigue et la complaisance – qui sont à l’origine de 95 % des blessures aiguës – nous sommes en mesure de prévenir les erreurs critiques qui sont à l’origine des problèmes de performance et des blessures. Et cela fait d’une pierre deux coups.
Si les athlètes apprennent à se composer avec ces attitudes, ils risquent moins de se tromper, et si vous faites moins d’erreurs, vous serez meilleur dans tout ce que vous accomplissez. La plupart du temps, les erreurs de performance ne sont pas une question d’habileté, il s’agit de savoir si vous aviez ou non vos yeux et votre esprit sur la tâche à ce moment-là. Si vous vous améliorez en ayant les yeux et l’esprit sur la tâche, vos performances s’amélioreront. Il s’agit de concentration et d’attention. Ça semble évident, mais cela mérite d’être renforcé par un langage simple.
Les entraîneurs et les athlètes sont enthousiastes à l’idée de réaliser leur potentiel. Nous pouvons utiliser cet enthousiasme pour prévenir les blessures.
#3. J’ai pu constater par moi-même que vous n’avez pas laissé votre blessure vous empêcher de participer pleinement à la vie quotidienne. Nous nous sommes rencontrés pour la première fois sur la rivière Adams, où vous faisiez du rafting en eau vive et du saut en falaise avec l’athlète paralympique Josh Dueck. Selon vous, quelle est la meilleure façon d’aborder la gestion de la peur après avoir subi une blessure dévastatrice comme celle que vous avez subie?
La peur est trompeuse. Elle s’accompagne généralement d’un certain niveau d’anxiété. Ensemble, elles peuvent certainement limiter les progrès.
Il est important de connaître ses limites. Si vous ne vous sentez pas à l’aise et que vous êtes nerveux avant un match de compétition ou l’exécution d’une nouvelle habileté, avant de prendre un risque, etc., c’est une bonne chose. Cela signifie que vous sentez que vous repoussez vos limites. Toutefois, si vous allez trop loin, si le risque est trop grand et que la peur apparaît normale, il vaut peut-être mieux faire marche arrière. La peur est un mécanisme de survie et quelque chose que nous ne devrions pas ignorer.
Il y a un seuil de défi que tous les entraîneurs devraient connaître. Nous devons mettre les athlètes suffisamment au défi pour qu’ils ressentent les nerfs et les papillons, mais pas la peur. Si la peur est réelle, cela signifie qu’il y a généralement une carence sur le plan des habiletés à combler avant de passer à l’étape suivante. En revanche, si l’énergie nerveuse n’est pas présente et que l’athlète se sent trop à l’aise, cela signifie probablement qu’il est susceptible de s’asseoir sur ses lauriers.
La complaisance est la tueuse silencieuse des rêves des athlètes. Elle cause des blessures, c’est vrai, mais si un athlète ne se sent pas mis au défi et ne ressent pas les papillons de temps en temps, il ne fera pas assez d’efforts. Il ne progressera pas. Cela enlève tout le plaisir. La performance en souffre. Le sport doit être amusant. Les athlètes ont besoin de sentir qu’ils progressent. Le défi est hyper important. Les défis doivent juste dépasser légèrement le niveau d’habileté.
La peur n’est pas amusante, mais pousser l’aiguille, et pousser à travers « les papillons » est amusant. Pour reprendre les mots d’une icône du ski, Tanner Hall, « quand on s’amuse, c’est là que les médailles arrivent. »
#4. Vous êtes le co-fondateur de HeadStartPro, une série de vidéos destinées à toucher tout le monde, des athlètes aux vétérans sur le retour. Comment avez-vous conçu cette idée à l’origine et comment le projet a-t-il évolué depuis son lancement?
HeadStartPro est issu du méga programme de formation à la sécurité appelé SafeStart. SafeStart aborde les facteurs humains de la sécurité afin de prévenir les blessures sur le lieu de travail. Lorsque j’ai découvert ces concepts après m’être blessé, j’ai su que je devais faire quelque chose avec la technologie dans le domaine du sport.
Nous avons commencé par aider les équipes à améliorer leur sécurité. Notre objectif était et a toujours été de maintenir les athlètes en bonne santé et actifs toute leur vie. Une blessure est le plus gros problème qu’un athlète puisse avoir. Si vous ne pouvez pas jouer, vous ne pouvez pas être performant. Comme je l’ai déjà mentionné, personne n’aime la sécurité. Ce n’est pas quelque chose qui vous fait sauter du lit le matin avec enthousiasme. Mais être meilleur qu’hier, c’est une raison plus que suffisante pour faire un effort. Ainsi, la performance entraîne un comportement plus sûr. Voilà la solution.
Il y a quelques années, nous avons décidé de passer à la formation axée sur la performance et la prévention des blessures avec HeadStartPro. Nous obtenons une représentation diverse d’équipes qui disent l’utiliser à 100 % pour un processus d’entraînement mental afin de performer à un niveau supérieur, tandis que d’autres disent que cela les maintient en bonne santé.
Dans tous les cas, c’est une victoire.
Pour consulter le cours d’apprentissage en ligne HeadStartPro de Mike Shaw, cliquez ici.